jeudi 27 octobre 2016

L’Elixir d’amour de Donizetti aux herbes folles du metteur en scène italien Stefano Poda

Strasbourg. Opéra du Rhin-Opéra de Strasbourg. Vendredi 21 octobre 2016

Gaetano Donizetti (1797-1848), L'Elisir d'amore. Ismael Jordi (Nemorino), Danielle de Niese (Ardina), Franco Pomponi (Belcore). Photo : (c) Klara Beck

Pour son premier essai en France, le metteur en scène plasticien Stefano Poda signe à Strasbourg un Elisire d'amore (Elixir d’amour) de Gaetano Donizetti dans un univers rongé par la végétation

Gaetano Donizetti (1797-1848), L'Elisir d'amore. Photo : (c) Klara Beck

Metteur en scène, chorégraphe, décorateur, costumier, éclairagiste italien, Stefano Poda a réalisé en vingt-deux ans plus d’une centaine de spectacles lyriques dans le monde. Seule la France l’a ignoré jusqu’en ce mois d’octobre. Même s’il eut de son propre aveu préféré commencer avec une production wagnérienne, c’est avec l’Elisir d’amore de Gaetano Donizetti (1797-1848) qu’il fait ses premiers pas en France, à l’Opéra du Rhin, relevant ainsi un défi avec un ouvrage primesautier. Naturellement, Poda situe l’action du melodramma giocoso en deux actes de Gaetano Donizetti aux confins du printemps et de l’été, dans un cube envahi par la végétation, avec une avant-scène bordée de fleurs, des murs couverts de lierre, un fond entouré d’arbres feuillus encadrant un ciel bleu argenté présentant quelques lézardes traversé par un viaduc. 

Gaetano Donizetti (1797-1848), L'Elisir d'amore. Danielle de Nise (Ardina), Ismael Jordi (Nemorino). Photo : (c) Klara Beck

Au centre du plateau tournant une pomme craquelée gigantesque moitié grise moitié blanche s’ouvrant en son centre et, en guise de véhicule du charlatan ambulant Dulcamara, l’ultime modèle Coccinelle de Volkswagen mise au point par Ferdinand Porsche à la demande du chancelier Adolf Hitler rongée par la mauvaise herbe. Les costumes sont tous plus ou moins fleuris, tandis que les soldats sont de cuir vêtus, les femmes portant chaussures rouges à haut talon dont elles font un énorme tas et disposent sur la Coccinelle.

Gaetano Donizetti (1797-1848), L'Elisir d'amore. Ismael Jordi (Nemorino). Photo : (c) Klara Beck

Le quintette vocal réuni pour l’occasion ne démérite pas dans cet environnement floral. Portés par l’esprit commedia dell’arte de l’ouvrage de Donizetti, les chanteurs s’expriment joyeusement, prenant un plaisir patent à s’exprimer dans ce cadre champêtre où le réalisme de certains objets est absorbé par un onirisme certain. Le ténor espagnol Ismael Jordi qui fit ses débuts en France en 2002 sur cette même scène de l’Opéra de Strasbourg est un Nemorino naïf et empressé à la voix souple et ferme, la soprano australienne Danielle de Niese une Ardina rayonnante, sensuelle, comédienne accomplie à la voix rayonnante. Le baryton italien Franco Pomponi est un sergent Belcore entreprenant, la soprano belge Hanne Roos une séduisante Giannetta. Seule la basse italienne Enzo Capuano n’est pas tout à fait à son affaire dans le rôle du Dr Dulcamara, dessinant un charlatan sans faconde et guère fourbe, tandis que le chœur de l’Opéra du Rhin incarne avec entrain le petit peuple basque. 

Gaetano Donizetti (1797-1848), L'Elisir d'amore. Danielle de Niese (Ardina), Enzo Capuano (Dr. Dulcamara). Photo : (c) Klara Beck

Dans la fosse, l’Orchestre Symphonique de Mulhouse fait un sans-faute (bois de toute beauté) sous la direction galbée et souple de la chef britannique Julia Jones qui restitue la partition dans toute sa variété de couleurs et de desseins.

Bruno Serrou


1) Jusqu’au 7/11 Opéra de Strasbourg, le 17/11 Théâtre de Colmar, 25 et 27/11 La Sinne de Mulhouse. Rens. : http://www.operanationaldurhin.eu 

Article paru dans le quotidien La Croix daté mardi 25 octobre 2016 

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